Lettre ouverte de Karine ROY-CAMILLE NICOLAS-ETIENNE, ancienne présidente du Comité Martiniquais du Tourisme, suite aux violences à l’encontre de touristes qui ont eu lieu à l’aéroport Aimé-Césaire ce week-end.
» Martinique, le 01er Mars 2020
Si bien des luttes sont justifiées et appellent à une conscientisation collective portée par tous, je m’interroge quant aux moyens employés.
J’assiste depuis quelques mois à un durcissement, voire à une radicalisation des prises de position visant à dénoncer des faits graves mais qui, par l’escalade générée, auront pour conséquence de nous dresser les uns contre les autres, de fissurer encore davantage notre Peuple pluriel qui gagnerait à s’unir.
Entretenir et alimenter la division nous affaiblira tous. Au nom de quoi faut-il des vainqueurs et des perdants ? Au nom d’une guerre ! Notre Peuple serait-il en guerre contre lui-même !? Y aurait-il mésentente sur ce qu’est un Peuple ? Un Peuple est riche de sa diversité, de ses souffrances surmontées mais non oubliées, et surtout de ses projets d’avenir. Quand je parle « Peuple », je ne parle pas du jeu politique ou idéologique. J’entends par « Peuple », celui qui ne veut laisser aucun des siens sur le bas-côté, celui qui -plus fort- aide le plus démuni à grimper.
Je ne suis ni idéaliste, ni rêveuse, mais je sais que pour réussir il faut embarquer les confiants, les indécis, les sans-avis et, plus que tout, faire preuve de pédagogie avec ceux qui demeurent hostiles par méconnaissance des enjeux, des conséquences des actes ou des non-actes.
Nous, Martiniquais, sommes tous doués d’une intelligence vive et d’une résilience hors du commun. Utilisons nos qualités pour progresser et non régresser, car en régressant les dommages commis nous paralysent et laissent la part belle à ceux qui ont dépassé les clivages qui nous entravent.
Nous, Martiniquais, ne pouvons tout de même pas sciemment nous vouloir du mal.
Je nous veux du bien ! Cela ne se déclare pas, cela se travaille. J’y œuvre à mon niveau depuis plus de trois décennies dans mon domaine de prédilection qu’est le Tourisme.
Aussi, ne puis-je que m’attrister lorsque je vois les images, faisant déjà le tour du monde, du traitement qui a été réservé le 29 Février 2020 aux croisiéristes européens regagnant l’aéroport Aimé Césaire.
Qui n’est pas inquiet du COVID-19 ? Nous le sommes tous, et ce, par le monde. Mais au nom de quoi pouvons-nous faire preuve d’une telle violence dans nos mots, dans nos attitudes ? Au nom de la peur ? Au nom d’un combat que l’on ne veut pas nommer ?
Je ne m’inscris pas dans cette violence et je ne reconnais pas la Française-Martiniquaise que je suis dans cette violence. Qui plus est, je la condamne !
Oui, nous devons être prudent. Oui, nous devons prendre les précautions nécessaires pour protéger les nôtres mais dans le respect de l’Autre.
Comment accepter de mettre à mal, en quelques heures, les progrès avérés et factuels que connaît notre Martinique, de retour sur l’échiquier touristique mondial ? Ce fantastique résultat est le fruit d’un travail collectif, celui des professionnels, des institutions et surtout, surtout, celui de la population.
S’il est bien une industrie sensible, c’est celle du Tourisme. La moindre crise occasionne un impact, qu’elle soit d’ordre sanitaire, diplomatique, sociale, environnementale, climatique…
Il nous faut toutes les surmonter avec courage et conviction au nom de la Réussite du Peuple Martiniquais
Alors, si vous êtes convaincus, comme moi, qu’un « capital confiance » se construit et s’entretient, qu’il y a des luttes qu’il faut mener pour avancer ensemble, dans la même direction et non nous affronter, choisissons la fermeté et la meilleure des armes : le dialogue ! Il y va de notre crédibilité et de notre image.
Construisons ensemble notre avenir, soyons un modèle d’exemplarité, personne ne nous en empêche ! »
Karine ROY-CAMILLE NICOLAS-ETIENNE
Professionnelle du Tourisme – Contact : karineroycamille@progressons.fr